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L’Europe et sa recherche d’une monnaie unique (1/2)

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L’euro, malgré ses imperfections dévoilées au grand jour avec la récente crise souveraine, est issu d’un très long processus mis en place il y a plus d’un demi-siècle par les Pères Fondateurs de l’Europe. Les questions monétaires ont perpétuellement été au cœur des discussions entre les acteurs de la construction.

La toute-puissance du mark à l'heure du serpent monétaire (source : Macronomy)
La toute-puissance du mark à l’heure du serpent monétaire (source : Macronomy)
La marche vers la monnaie unique a été entamée juste après le « Nixon choc » de 1971, lorsque les Etats-Unis abandonnèrent officiellement leur convertibilité-or. Auparavant, seules de timides initiatives avaient été mises en place pour contrebalancer les effets négatifs du système de Bretton Woods, comme le plan Werner de 1970. Suite au choc, des dévaluations généralisées surviennent, aboutissant à un flottement généralisé des principales monnaies mondiales. De tels soubresauts risquent à tout moment de réduire à néant les efforts de convergence pensés et mis en place en Europe depuis le début des années 1960.

En 1972, l’accord de Bâle crée le Serpent monétaire. Au-delà de la simple image, il s’agit d’autoriser les fluctuations des monnaies européennes dans un intervalle de variation réduit (plus ou moins 2,5%). Néanmoins, ce système n’est pas suffisamment efficace pour empêcher les spéculations et signe la domination du mark allemand par rapport aux autres monnaies, obligées de quitter le Serpent (franc français, livre britannique, lire italienne). Ce système est entré en vigueur trop tôt, les incertitudes sur les monnaies mondiales étant toujours très vivaces lors de la signature de l’accord de Bâle.

La déstabilisation s’accroît en 1977-1978 avec l’affaiblissement du dollar par rapport au mark allemand. Le gouvernement américain entretient cette chute, si bien que la toute-puissance du mark peut mettre en péril le projet européen. C’est avec le Système Monétaire Européen (SME), en 1979, que la politique monétaire des petits pas est abandonnée. Ses règles de fonctionnement sont strictes et un panier de monnaies de référence est créé, l’ECU, qui sert de base aux fluctuations des différentes monnaies européennes. Les devises flottent donc par rapport à une « moyenne » des autres (le terme « moyenne » est ici légèrement galvaudé, puisque trois monnaies comptent pour les deux tiers de la valeur de référence de l’ECU).

Néanmoins, il n’est efficace que jusqu’au milieu des années 1980. Tous les pays européens en lutte contre l’inflation adoptent des politiques monétaires strictes (politiques dites de « désinflation compétitive »). Et surtout, le SME est incapable de faire face aux attaques spéculatives de 1992-1993 sanctionnant les manques de compétitivité du Royaume-Uni ou de l’Italie et touchant ensuite la France et l’Irlande, par effet de contagion. Un clivage apparaît alors, entre pays défendant coûte que coûte le SME (au détriment, a posteriori, de leur économie) et ceux se permettant des fluctuations énormes autour des cours pivots, aboutissant, de fait, à leur abandon du système.

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